Figurez-vous qu’il y a fort longtemps que j’hésite à rentrer ici. J’y pense, j’envisage, je salive derrière la vitrine, mais jusqu’ici, je trouvais invariablement, si ce n’est mieux, du moins différent à faire. Larges cercles concentriques dédiés à l’évitement. Comme un petit garçon amoureux qui ne sait s’approcher pour déclarer son béguin. Certain pensent qu’en amour, le meilleur moment est l’escalier. Alors disons que je piétinais dans un escalier à 800 km de ma belle.
Le pire est que je commençais à entrevoir ce que je voulais dire ici. A envisager que je ne suis pas moins légitime que d’autres pour parler de ce qui m’est arrivé. Ah oui, j’allais presque oublier de dire que le nœud ici était qu’il m’est arrivé un truc, une bricole un peu juteuse (même si vous allez être vraisemblablement déçu au final), mais on y reviendra. Je m’autorisais presque à en faire un sujet, en somme. Et même, il m’arrivait parfois de ne pas retrouver ma pensée dans ce qui se disait déjà de-ci de-là. Ça commençait presque à ressembler à une expertise de soi-même. C’est pas si mal, tout compte fait. Fallait juste que je me motive, encore un petit effort, un presque rien, une respiration, une… oh des chats dans un tiroir. C’est si mignon. Oh et puis une belle cuite ! Je ne peux quand même pas écrire bourré, ça ferait pas sérieux…
Il ne manquait pas grand-chose, au final, pour que je m’y mette. A force de triturer l’idée, ça allait bien finir par noircir la page. Mais le sort est taquin, et la vie a un peu vrillé. Je suis bien là aujourd’hui, mais mon thème est tout chamboulé. Parce que figurez-vous qu’il m’est arrivé une tuile. Ou que du moins le temps m’a rattrapé : je suis mort. C’est idiot, hein ?
Oh je vous vois venir, et non, je ne suis pas un fantôme, et oui, je dramatise à moindres frais. D’autant qu’il serait plus sain de désenfler mon propos en en exhibant sa plus sotte naïveté : c’est bien une misérable rupture qui me fait divaguer ici. Du non amour, ou la fin de. Et je sais, on me le répète bien assez, je ne suis ni le premier ni le dernier, crois-moi, on s’en remet, et puis bon, il va peut-être être temps de passer à autre chose.
Je sais tout ça, et croyez-moi, je comprends bien à quel point ça ridiculise ma position. Je ne me sens pas fier, c’est même l’extrême opposé.
Néanmoins, il faut quand même que je reconnaisse la particularité de ma situation (vous le ferez peut-être vous aussi, si vous avez bon cœur et ne souhaitez pas m’enterrer trop vite), ne serait-ce que pour ne pas sombrer : c’est la femme de ma vie qui est partie. Enfin ne riez pas (bon, vous pouvez, hein, mais s’il vous plaît, dans mon dos) : c’est littéralement la femme de ma vie. Je ne saurais trouver de mots plus justes. LA-FEMME-DE-MA-VIE.
Comprenez que sans elle, je ne serais plus de ce monde (en tout cas, ma probabilité de survie en aurait pris un vilain coup). Je me console en me disant qu’il en va de même pour elle aussi. Je veux dire par là que nous avons survécu grâce à la présence de l’autre. Je l’ai calmée quand elle m’a réveillé, et cette alchimie nous a permis de nous en sortir. De quoi je parle, vous demandez-vous, parce que ça vous intéresse plus que les reniflements d’un garçon vexé ? Mais d’un massacre, évidemment, au sens propre, car il n’y a que le sens qui sait rester ainsi dans une telle situation. Seuls les mots demeurent immaculés quand l’univers se retrouve souillé.
Ainsi on se relève, on avance. Puis on meurt quand notre sens même fini par s’effondrer. C’est un peu de cela dont je vais parler ici, de ce poids dont je vais me décharger. Et on verra ensuite ce qui peut bien rester.
Merci. ❤
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Vu que j’ai découvert ton site hier avec le papier de novembre, je remonte le temps et je vais tout lire 😉
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